Embellir la ville
On l’a vu, Frontenac est persuadé du potentiel de la ville de Québec, qu’il considère destinée à un grand avenir. Pour cette raison, il est résolu à ne plus laisser les particuliers bâtir leurs maisons au petit bonheur la chance. Il souhaite y mettre de l’ordre. Dans une missive, il explique au ministre que « dans des établissements comme ceux-ci qui peuvent, un jour, devenir très considérables, on doit, je crois, songer non seulement à l’état du présent dans lequel on se trouve, mais à celui où les choses peuvent parvenir ».
Ce règlement défend de bâtir des maisons avant d’avoir obtenu les alignements nécessaires, « afin que lesdites maisons soient posées sur celui des rues tirées sur le plan qui sera fait de la ville de Québec ». Les nouvelles maisons construites à la basse-ville doivent avoir au moins les deux pignons en maçonnerie. Aucun propriétaire ne peut avoir un poêle, qu’il soit de fer ou de briques, sans qu’il ne soit mis dans une cheminée. Toutes les maisons doivent aussi avoir leurs propres latrines. Enfin, tous les propriétaires de la basse-ville doivent rehausser les rues bornant leurs terrains afin de faciliter l’écoulement des eaux et ainsi de remédier « à la grande incommodité qu’on souffre en marchant dans les rues à cause de la quantité des boues que la fonte des neiges y produit ».
Ce souci urbanistique se manifeste tout particulièrement pendant le premier mandat de Frontenac en Nouvelle-France (1672-1682).
Règlements faits par M. le comte de Frontenac, 28 mars 1673. BAnQ, TP1,S28,P807.

Héros de la bataille de Québec
Au printemps de 1689, la guerre éclate entre la France et la Ligue d’Augsbourg dirigée par l’Angleterre. Malgré ses 67 ans, Frontenac est renvoyé en Nouvelle-France afin de mener une attaque d’envergure contre New York (Albany). En effet, les Anglais incitent les Iroquois à attaquer sans cesse les Français et leurs alliés autochtones. L’arrivée tardive de Frontenac à Québec, le 15 octobre 1689, l’empêche toutefois de mener une attaque d’envergure.
Durant l’hiver 1690, il autorise trois expéditions punitives réalisées en collaboration avec les Abénaquis qui ont, eux aussi, des comptes à régler avec les établissements anglais. Le bilan est lourd pour les villages attaqués. En réaction, les colonies anglaises décident d’envahir la vallée du Saint-Laurent.

La défense de Québec en 1690 par Frontenac durant la guerre de la Ligue d’Augsbourg, Charles Van Tenac, 1847. Wikimedia Commons, domaine public.
Une réplique célèbre
Partie de Boston, une armada de 34 navires commandée par l’amiral William Phips arrive à Québec le 16 octobre 1690. Vers 10 h du matin, un émissaire apporte une sommation écrite de l’amiral anglais demandant à Frontenac de capituler immédiatement: «Votre réponse positive, dans une heure, par votre trompette, avec le retour du mien, est ce que je vous demande sur le péril qui pourra s’ensuivre.»
Entouré des membres du Conseil souverain, le vieux et flamboyant Frontenac s’exclame: « Je n’ai point de réponse à faire à votre général que par la bouche de mes canons et à coups de fusil; qu’il apprenne que ce n’est pas de la sorte qu’on envoie sommer un homme comme moi; qu’il fasse du mieux qu’il pourra de son côté, comme je ferai du mien. »

Frontenac répondant au major Thomas Savage, l’émissaire de l’amiral Phips, le 16 octobre 1690. C.W. Jefferys, Archives publiques du Canada. Domaine public.
Célébrer la victoire
Québec est bombardée, mais les navires anglais subissent plusieurs dommages, dont la perte du drapeau du navire amiral. Les tentatives de débarquement sont repoussées par les Français, notamment à Lévis et à la baie de Beauport. Le 23 octobre, les milliers de soldats anglais abandonnent le combat. C’est un triomphe personnel pour Frontenac!
À Versailles, on souligne l’événement en frappant la médaille Kebeca Liberata. Le revers représente une allégorie de la ville de Québec sous forme de femme assise sur un rocher, les armes de la France sous son bras. Les pavillons et étendards portant blason anglais gisent à ses pieds. À ses côtés, un castor. Le fleuve Saint-Laurent personnifié s’appuie sur une urne. Sur l’avers, le profil de Louis XIV et l’inscription « Ludovicus Magnus Rex Christianus » (Louis le grand roi très chrétien).

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